Homélie de Mgr Laurent Ulrich - Messe à Saint-Lambert de Vaugirard dans le cadre du Festiv’Art chrétien de Vaugirard

Dimanche 5 mai 2024 - Saint-Lambert de Vaugirard (15e)

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– 6e Dimanche de Pâques – Année B

- Ac 10,25-26.34-35.44-48 ; Ps 97,1-4 ; 1 Jn 4,7-10 ; Jn 15,9-17

Dans cet évangile, Jésus nous invite à la joie : à la joie de la rencontre avec lui-même ; à la joie de la rencontre avec son Père dont il est venu faire la volonté, au milieu de nous, par amour de lui. Dans la première lecture, tirée du Livre des Actes des Apôtres, saint Pierre nous fait découvrir ce qu’il est en train de découvrir lui-même : que le Seigneur Dieu accueille dans son cœur et ne cesse de rechercher pour sa joie, ceux qui ne sont pas, ou pas encore, dans notre communauté ecclésiale, dans le premier groupe de ceux qui sont les disciples de son fils. C’est une occasion de joie aussi que de découvrir cela. L’apôtre Pierre est tout étonné et ceux qui sont déjà disciples de Jésus et viennent du monde juif sont stupéfaits comme lui, mais « stupéfaits » signifie aussi dans la joie de découvrir cela. Évidemment les deux choses vont ensemble, elles sont liées. « Tout est lié » comme dit souvent le pape François. Et là tout est déjà lié : il s’agit de la rencontre du Seigneur, que nous faisons dans l’écoute de sa Parole, dans la célébration des sacrements, dans la liturgie, et le fait d’être rassemblés comme nous le sommes ce matin dans la découverte de ce qu’il nous demande de vivre et de faire. Tout est lié : la rencontre du Père et du Fils et la rencontre des frères, y compris les frères et les sœurs qui ne sont pas de notre communauté, qui ne sont pas touchés jusqu’à présent par sa Parole au point de vouloir être membres de la communauté chrétienne et, comme un certain nombre le font chaque année - cette année très nombreux - de demander à entrer dans l’Église par le baptême.

Tout est lié : quand nous allons à la rencontre du Seigneur dans l’intimité de notre prière ou de la ferveur de la communauté rassemblée, nous sommes sans cesse renvoyés vers la rencontre des autres qui ne sont pas de notre groupe. Et quand nous sommes dans cette rencontre-là, nous savons que nous sommes aussi toujours renvoyés à la rencontre du Seigneur vivant : quand nous les rencontrons, c’est lui aussi que nous rencontrons.

Dans les récits successifs qui composent le Livre des Actes des Apôtres, il y a comme deux pentecôtes. La première, que nous connaissons bien et que nous célébrerons dans quinze jours : le récit dans lequel nous voyons les Apôtres s’adresser à ceux qui sont venus à Jérusalem en pèlerinage, de beaucoup de points de l’horizon, parlant des langues et animés par des cultures diverses, mais s’étant rassemblés à Jérusalem dans le but d’aller à la rencontre du Seigneur vivant, de leur Dieu. C’est la Pentecôte de Jérusalem, la Pentecôte des Juifs, qui vont se tourner vers le Seigneur Jésus avec foi.

Mais dans ce chapitre 10 - donc beaucoup plus tardif dans le récit des Actes des Apôtres - il y a cette rencontre qui ne se déroule pas à Jérusalem mais à Césarée, ville dont le nom est latin, ville de garnison romaine, c’est-à-dire ville païenne, non pas dans le sens où païen voudrait dire dépravé, mais dans le sens où elle ne croit pas dans le Dieu d’Israël. Eh bien voilà donc qu’il se passe une autre Pentecôte : la Pentecôte des païens. La Pentecôte de ceux qui ne sont pas dans le groupe des croyants. Les deux sont aussi significatives l’une que l’autre ; les deux sont aussi belles l’une que l’autre ; les deux sont aussi importantes l’une que l’autre. Vivre fraternellement entre nous, il semble que votre communauté le vive plutôt bien, mais chacun sait que ce n’est pas toujours très facile. Mais vivre tournés vers ceux que le Seigneur appelle, vers ceux à qui le Seigneur fait le cadeau de parler comme à des amis, voilà ce qui est très intérieur à notre propre comportement de foi, à notre propre expérience de croyants. Nous savons que nous ne pouvons pas vivre simplement de la joie de Dieu en nous refermant sur nos propres communautés, en nous croyant être les seuls à garder la foi, la tradition. Et, justement, il me semble qu’ici vous cherchez bien à être dans ce lien permanent avec le quartier, avec des gens qui ne fréquentent pas l’église, avec ceux simplement à côté de qui vous vivez, et vous le manifestez. Vous l’avez manifesté par ces quatre jours symboliques d’une recherche profonde : jour après jour, être là au milieu des autres, les considérer comme des personnes à qui le Seigneur s’adresse aussi comme à des amis.

Reprenant la belle formule qui vient de l’Écriture, de l’Ancien Testament : « Dieu s’adresse à ceux qu’il choisit comme à des amis », le Concile de Vatican II fait écho à ce que nous venons d’entendre. « Je ne vous appelle plus serviteurs, je vous appelle amis » : voilà la bonne nouvelle de la Pentecôte des croyants et de la Pentecôte des païens ; voilà ce que nous sommes invités sans cesse à faire.

Depuis quelques années, vous souhaitez qu’en cette occasion du Festiv’Art puisse être menée une rencontre symbolique forte avec ceux qui sont dans ce quartier pour construire quelque chose avec eux, chercher un chemin qui mène vers Dieu à travers l’art et à travers toutes ces manifestations que vous vivez.

Que le Seigneur continue de nous donner, de vous donner cette joie de la rencontre de lui dans l’assemblée, dans l’écoute de sa Parole, dans la célébration des sacrements, dans la prière commune, dans la prière personnelle. Que le Seigneur continue de vous donner cette joie de la rencontre des autres dans le quotidien de l’existence et dans des moments un peu exceptionnels comme ceux que vous venez de vivre.

C’est ce que nous demandons : d’être entretenus en permanence dans cette façon de nous situer les uns à l’égard des autres, toujours en visite les uns chez les autres, toujours en découverte du chemin que les autres font et que le Seigneur ne cesse de faire à la rencontre de tous ceux qu’il aime.

Que cette grâce soit notre joie, votre joie d’aujourd’hui, et de tous les jours.

+Laurent Ulrich, archevêque de Paris

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